mercredi, 24 janvier 2007

PREMIERE NEIGE


Noooooonn!! Le calendrier m'annonce qu'on est déjà mercredi, mais moi je décrète ici et maintenant que c'est pas possible... j'ai pas encore dormi, on est donc toujours mardi. Et voilà donc l'histoire de mon mardi.

Première neige disais-je. Une première fois qui pousse à l'introspection et qui incite à mettre des mots sur ce qui bouge à l'intérieur. J'ai observé la nuit tomber et les flocons scintiller comme des millions de paillettes, et mon chemin qui s'imprime sur cette page blanche. Une phrase en boucle dans mon cerveau surchargé: "j'ai envie de partager ce moment, j'ai envie de partager ce moment, j'ai envie..." Mon regard par dessus mon épaule... personne. Ce mot-là aussi résonne: personne.

La neige est un révélateur. Un incroyable indicateur du niveau d'enfance qui brûle à l'intérieur de chacun. Et aujourd'hui, j'ai observé. Je nous ai vu contempler les rues disparaître sous la masse blanche, j'ai vu notre impatience. Je les ai vu sortir du café et commencer cette bataille essoufflée. J'ai vu Gilles enfiler ses gants et plonger, et ce moment incroyable, une image figée: ce magnifique pianiste, 1m90 de talent et l'enfance qui s'imprime d'un seul coup sur son visage. Ce sourire et cette accélération pour se joindre à la mêlée dans les flocons de nuit. Cet homme qui passe hilare devant la vitrine, une énorme boule de neige dans ses mains mates. Je me suis vue enfoncer mon bonnet plus loin sur mes yeux et courir dans ce combat éphémère. Plus tard, j'ai vu ce photographe au milieu de la place, perdu dans son monde, capturant à coup de flash quelques bouts de magie. J'ai vu cette femme observer cette nuit suspendue, la fenêtre grande ouverte, les épaules nues.

Et puis j'ai vu ce trio de jeunes cadres dynamiques passer, la chaussure brillante et la mallette indifférente, traçant leur chemin nocturne bien à l'abri sous un large parapluie. Un parapluie... pour avancer au sec et s'en sortir indemne. Et moi je me demande: quelle part d'enfance reste-t-il lorsqu'on devient imperméable aux bonheurs simples?

Avant de rentrer dans la solitude de ma maison, un détour dans mes rues et places désertes. Dans mes oreilles, 2 minutes 51 bien trop courtes de pure mélancolie musicale. Je ne dirai pas qui, ce soir je garde le secret sur la bande-son de ce moment à la dérive. Ces mots à peine esquissés, en boucle encore et encore, et encore. La mélodie dicte mes mouvements. Mes pas ont tracé un mot dans la neige, ou peut-être étais-ce un nom, je ne sais plus. La tête perdue ailleurs, j'ai même oublié une lettre, peu importe, la neige a sans doute déjà tout recouvert, les omissions et les regrets. Et comme unique signature, j'ai laissé ma silhouette sur le sol. Les flocons qui caressent mon visage, j'ouvre la bouche, la neige fond sur le bout de ma langue. Le goût de l'enfance. Je referme la parenthèse du souvenir.

Juste là, la flamme des bougies à mes côtés, le reste de l'appart' dans la nuit. Je veux naviguer à l'aveugle du haut de mon paquebot sur cette écume immaculée. Seule maître à bord, direction le Pôle Sud, la Terre Adélie ou ailleurs. Direction l'endroit où les fragments se recollent, où la respiration retrouve son rythme. Direction l'endroit où l'apesanteur relâche la pression, où les mots ne sont plus de plomb, où les étoiles filent derrière les yeux. J'aimerais connaître le chemin par coeur, par coeur, un mot de taille. Pourtant l'itinéraire reste flou, je me cogne parfois, quelques icebergs sans doute. Fire & ice.

2 commentaires:

Anonyme a dit…

ne serait ce pas l'auberge des 4 vents, la vue depuis la chambre avec la baignoire??????????

Jelena

La Fée Electricité a dit…

tout juste... c'est bien là, aux premières heures du 2 janvier 2006, l'hôtel vide, complètement à notre disposition. le rêve