lundi, 12 mars 2007

... PAS TANT QUE MOI


Quelle époque, mes aïeux, quelle époque. On nage en pleine ère du "pré": précuit, préfabriqué, prémâché, précarité (mais si), prétérit (ah non... ça c'était les latins). Tout est à portée de main pour éviter le moindre effort inutile. On se fait livrer des maisons en kit aussi faciles assembler que le vaisseau spatial Légo, on bouffe les petits plats que Betty nous a mitonnés avec amour (tiens... l'est pas morte y a pas longtemps celle-là?). Trop facile la vie!

Et dans la loi du moindre effort, nos sentiments si banals et clichés, anticipés et pré-exprimés à notre place. Si prévisibles. Lorsque je navigue dans le menu de mon Nokia rose fille, si je surfe sur les options des messages, je peux m'éviter une foulure du pouce grâce aux messages pré-écrits pour moi, par des gens assez malins pour prévoir les situations les plus communes de ma vie: "je suis en retard", "je suis occupé" (désolée les filles... les verbe occuper concerne toujours le genre masculin), "rendez-vous à", et le comble du cynisme... "moi aussi je t'aime"... parce que oui, recevoir des mots d'amour et y répondre de la manière la plus entendue qui soit... c'est ce qu'on fait tous non? Je t'aime. Moi aussi je t'aime. Aussi simple que ça. Aussi vide de sens et désincarné que ça... moi aussi je t'aime.

Et pour achever de me déprimer, cette carte sur laquelle je suis tombée l'autre jour à Paris, et que je n'ai pu m'empêcher d'acheter. Comme si elle me faisait de l'oeil, comme si elle m'était personnellement adressée, malheureusement, quand je l'ai ouverte... elle n'était pas signée. Incroyable quand même, une carte préfabriquée qui anticipe le fait qu'un jour, quelqu'un (masculin encore, visiblement... parce que oui, pour la version fille ils ont sans doute imaginé un truc du genre: "c'est pas grave"), que quelqu'un donc, aurait à présenter de si piteuses excuses qu'il fallait l'aider à trouver les mots justes: désolé. Pour qui? Pourquoi? Ca me laisse songeuse. "Désolé, je ne t'aime plus... je pars avec la secrétaire", "désolé, j'ai dilapidé toutes nos économies au casino", "désolé, j'ai oublié notre bébé dans le caddie du supermarché, je viens juste de m'en rappeler, oups". Désolé, certes, mais pas tant que moi.

1 commentaire:

Anonyme a dit…

Ahhhh, le "moi aussi je t'aime" préenregistré dans les nokia... J'ai failli faire une crise cardiaque en voyant ça... Affreux.

Le résultat: je n'ose plus cette formule, pourtant belle et toute simple. Je creuse mes méninges pour ne pas emprunter mon vocabulaire au "tout fait" commercial.

Mouais mouais mouais, drôle d'époque. Mais bon...

des bécots
J.