vendredi, 18 juillet 2008

MON JEANS ET MES FESSES


Il y a quelques 107 ans de ça, j'avais écrit un article sur au sujet de mes jeans dans un magazine. Ça ressemblait à peu près à ça:

Ma biographie? Jamais déversée sur les pages adolescentes d'un journal intime, jamais coincée dans le sérieux d'un album photos. Les pages de ma vie, c'est sur la toile de mon jeans qu'elles se gravent, pas à pas

Biographie approximative
Je ne sais pas vous, mais moi j'ai toujours eu un jeans mythique. Notez bien que je ne dis pas des jeans, mais MON jeans, celui qui devient le meilleur ami de mes fesses pour un laps de temps plus ou moins long. Le costume essentiel du film de ma vie, ce bout de toile sur ma peau qui accompagne le moindre de mes mouvements, peu importe l'occasion. La rencontre avec LE jeans, c'est tout pareil que la rencontre avec un homme: il faut que ça soit fulgurant, qu'on sache tout de suite si c'est le bon. Bien sûr, pas le bon pour toute la vie jusqu'à ce que mort s'en suive, mais le bon jusqu'à ce qu'il passe de mode (le garçon bien sûr, pas le jeans).
Comme dans un journal intime, les pages de ma vie s'inscrivent en filigrane dans les coutures de mon jeans, se glissent dans les poches, les revers. Je peux y retracer les événements, gravés en Braille sur le tissu: "Ah oui, c'est la tache de graisse du barbecue de l'an passé". "Ça, c'est le trou au genou hérité de ma dernière tentative d'acrobatie en skate board... je sais, je fais pas de skate, le trou est là pour m'aider à m'en rappeler".C'est bien simple, je peux me remémorer les différentes périodes de ma vie rien que me souvenant quel était le jeans du moment: l'adolescence avec mon premier 501 qu'il fallait acheter troué (la joie des parents de débourser 100 balles pour cette ruine), et forcément, comme à 17 ans on en fait toujours trop, non seulement le mien était-il troué au genou gauche, mais aussi à la fesse droite. Aïe. Mes 20 ans et mon jeans diabolique, celui qui me faisait un cul d'enfer (ou peut-être étaient-ce mes 20 ans?). Le retour en enfance pour mes 25 ans avec cette incroyable salopette vintage, celle avec l'attache qui coinçait à chaque fois qu'il venait à un garçon l'idée de me déshabiller.
Je n'ai pas une âme de collectionneuse, peu de photos, pas de reliques poussiéreuses du genre: "la serviette dans laquelle il s'est mouché en octobre 89", mais mes jeans, eux, je les garde précieusement, ils sont mes trophées de vie.

Le drame
Le drame c'est chaque fois qu'un jeans rend l'âme, ou qu'il devient telement obsolète qu'on ne peut décemment le porter sans qu'il ne trahisse notre âge: "Tiens, tu portes le modèle qu'ils ont arrêté de fabriquer en 1992". Mon jeans du moment, c'est mon légendaire Diesel déniché à New York voilà 3 ans. Je l'aime d'abord parce que je l'ai gagné grâce à un paris avec mon amoureux: il a perdu, j'ai eu mon jeans hors de portée de mes sous. Je l'aime parce qu'il tombe parfait sur le bas de mes hanches, mais sans dévoiler la face cachée de la lune dès que je me baisse. Et voilà que mon jeans fétiche se meurt, ça fait des lustres que je marche dessus et que j'oublie de faire un ourlet, le tissu se désintègre et le trou à la fesse droite nous guette. Mon jeans part en poussière et le drame, c'est quand il faut se mettre à la recherche de son remplaçant, le drame, c'est de se rendre compte que le temps file, sur la toile, comme sur les visages.

Finalement
Après des kilomètres d'essais infructueux, de frustration face aux aberrations des diktats de la mode (jeans trois fois trop serrés, des tailles basses jusqu'à mi-fesses, des toiles moches, des faux trous), je me dis qu'au fond, il est pas si délabré que ça mon jeans new-yorkais. Finalement, il est peut-être increvable, la preuve, il a duré plus longtemps que mon dernier amoureux. Je me dis qu'avec un petit ourlet et quelques raccommodages, il devrait bien tenir encore quelques années. Y a plus qu'à prier, et se mettre à la couture. Voilà qui n'est pas gagné.

Voilà en substance le contenu de l'article et je peux vous dire, plus de 2 ans après tout ça que les prières n'ont pas suffit. Carrément pas. Mon jeans Diesel est en lambeaux, je l'ai usé jusqu'à la corde, ça on peut le dire. Le trou tant redouté est arrivé, et puis un autre, et encore un. De longs mois que je cherche son frère jumeau, mais la marque a eu la riche idée de ne plus fabriquer ce modèle. Je deviens la maudite du jeans, obligée de se rabattre sur des modèles approximatifs et périssables. Et sans mon jeans, je ressemble à pas grand chose.
Mais voilà-t-y pas que l'autre jour, au détour du vide-grenier de la place de Milan, j'avise au loin, de mon oeil de lynx, un stand qui a l'air plutôt pas mal (et qui vend des t-shirts de Lio m'annonce Naila). Je m'approche, farfouille nonchalamment dans les tissus colorés, et là, négligemment accroché sur un cintre, à portée de ma main et de mon coeur battant la chamade: un jeans Diesel presque copie conforme du mien! Je l'observe de plus près, quelle taille? Suspense. Ma taille! (ou presque). Un jeans pas aussi parfait que le mien, mais quand même, la bonne toile, le bon délavage, la bonne tenue. C'est donc ici que je devais le trouver. Reste à s'enquérir du prix. Je suis quand même prête à casquer une bonne somme vu qu'il est dans un état tip top et que pour son prédécesseur, j'avais déboursé une bonne liasse de dollars. Alors, combien? Hu, hu, hu, j'en rigole encore. Pas 100 balles, non, ni 50, ni 20... ni même 10. 7 francs! J'ai payé 7 francs pour ce nouveau jeans mythique qui ne quitte plus mes fesses. 7 francs! Joie et bonheur (et un bien long post).

8 commentaires:

Anonyme a dit…

Ça fait du bien le bol des fois hein.
Mais je crois qu'au-delà d'acquérir quelque chose de super cool et d'en être ravie, c'est surtout le pied de nez au tarif exorbitant dudit truc cool qui est jouissif pour les fauchées que nous sommes! Je me rappelle avoir gloussé pendant des semaines lorsque j'ai réussi à choper une chaîne NAD et des enceintes vintage de l'acousticien Jean Maurer (minimum 2000.- la paire) pour... 310 balles sur Ricardo.
Des fois, moi j'dis, y'a une justice.

Des becs depuis dedans.

Anonyme a dit…

C'est pas de la justice, mais plutôt le contraire, qui fait que les même qui étaient suffisament riches il y a 15 ans pour acheter ton NAD et tes colonnes, le sont toujours aujourd'hui autant pour en changer et te vendre les miettes, car il n'y a pas de petit profits comme on dit. Ca fait des pauvres heureux, qui plutôt que de leur couper la tête, les remercie et vont tout bonheur, le porte monnaie léger, bêler dans leur appartement trop exigu de toute façon pour bien profiter de colonnes Maurer.

La Fée Electricité a dit…

c'est vrai qu'ils sont trop petits nos appart'. et c'est vrai aussi que c'est bien du souci notre rapport à la consommation et notre position de poids plumes de ce monde capitaliste. on a une chance inouïe c'est vrai, des prises de têtes futiles pour savoir si on va prendre notre nouvel ordi en blanc ou en noir, la bagnole en gris métallisé ou rouge. mais il est vrai aussi qu'un pourcentage infime de la population mondiale se partage le 90% des richesses de la planète et que nous ne sommes tous que de microscopiques boulons dans ces gigantesques rouages.

une paire de jeans ne devrait jamais coûter plus de 7 francs, et les gens qui les fabriquent devraient gagner leur vie décemment.

consommer plus/moins/mieux, couper la tête aux bourgeois, faire la révolution ou regarder cauet à la télé? (écran 106 cm acheté à crédit, of course)

Anonyme a dit…

si jamais je viens de trouver le trésor absolu ! un hôpital à jean's ! à la Chaux-de-Fonds le magasin Doucette Follette sauve nos denim pour 3 fois rien !

La Fée Electricité a dit…

heyyyy! un hôpital pour mes jeans en bout de course? quelle bonne nouvelle dans cette belle journée. on va pouvoir soigner mes jeans, on va pouvoir soigner mes jeans!

Fée la photo a dit…

rien a voir....
mais été tu au concert de Patrick Watson hier soir à Paléo?

La Fée Electricité a dit…

non point. en fait j'avais même oublié qu'il y jouait. c'est typiquement le genre de concerts que j'ai envie de voir dans une salle ultra intimiste, plutôt que dans la jungle nyonnaise.

t'y étais? c'était comment?

Fée la photo a dit…

j'aurais aussi préféré le voir dans une salle.la prochaine fois ;-)
j'ai adorée! le son, la groupe et Patrick. J'aime vraiment ce qu'il fait!